Affaire C-41/02
Commission des Communautés européennes
contre
Royaume des Pays-Bas
«Manquement d'État – Articles 30 et 36 du traité CE (devenus, après modification, articles 28 CE et 30 CE) – Denrées alimentaires auxquelles des vitamines ou des sels minéraux ont été ajoutés – Législation nationale subordonnant leur commercialisation à l'existence d'un besoin nutritionnel – Mesures d'effet équivalent – Justification – Santé publique – Proportionnalité»
|
Conclusions de l'avocat général M. M. Poiares Maduro, présentées le 14 septembre 2004 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 2 décembre 2004 |
|
|
|
|
|
|
|
Sommaire de l'arrêt
- Libre circulation des marchandises – Restrictions quantitatives – Mesures d'effet équivalent – Réglementation nationale subordonnant systématiquement la commercialisation de denrées alimentaires enrichies en éléments
nutritifs à l'existence d'un besoin nutritionnel de la population – Inadmissibilité – Justification – Protection de la santé publique – Absence – Violation du principe de proportionnalité
(Traité CE, art. 30 et 36 (devenus, après modification, art. 28 CE et 30 CE))
Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 30 du traité (devenu, après modification, article 28 CE) un
État membre qui applique une pratique administrative aux termes de laquelle des denrées alimentaires de consommation courante
enrichies en vitamine A (sous la forme de zétinoïdes), en vitamine D, en acide folique, en sélénium, en cuivre ou en zinc
qui sont légalement produites ou commercialisées dans d’autres États membres ne peuvent être commercialisées sur son territoire,
lorsqu’elles ne sont ni des produits de substitution ni des denrées restaurées au sens de la réglementation nationale, que
si cet enrichissement répond à un besoin nutritionnel dans la population de cet État membre, de surcroît sans qu’il soit vérifié
si ces denrées n’ont pas vocation à se substituer à des denrées déjà commercialisées pour lesquelles l’adjonction des mêmes
substances nutritives est obligatoire.
En effet, si le droit communautaire ne s’oppose pas à ce que la réglementation d’un État membre, en application du principe
de précaution, interdise, sauf autorisation préalable, la commercialisation de denrées alimentaires lorsque des substances
nutritives autres que celles dont l’adjonction est déclarée licite par ladite réglementation y ont été ajoutées, dès lors
qu’il appartient aux États membres, à défaut d’harmonisation et dans la mesure où des incertitudes subsistent en l’état actuel
de la recherche scientifique, de décider du niveau auquel ils entendent assurer la protection de la santé et de la vie des
personnes, ce pouvoir d’appréciation doit toutefois être exercé dans le respect du principe de proportionnalité. Il incombe
en outre aux autorités nationales de démontrer dans chaque cas d’espèce, à la lumière des habitudes alimentaires nationales
et compte tenu des résultats de la recherche scientifique internationale, que leur réglementation est nécessaire pour assurer
la sauvegarde de la santé publique et, notamment, que la commercialisation des produits en question présente un risque réel
pour celle-ci.
Dans ces conditions, le caractère systématique d’une interdiction de commercialisation des denrées enrichies, tel qu’il résulte
de la pratique administrative de l’État membre concerné, ne permet pas de respecter le droit communautaire quant à l’identification
et à l’évaluation d’un risque réel pour la santé publique, lequel exige un examen approfondi, au cas par cas, des effets que
pourrait entraîner l’adjonction à cette denrée des vitamines et des sels minéraux en cause.
(cf. points 42, 44, 46-47, 63, 70 et disp.)